Syracuse

"No Sudden Move", Steven Soderbergh / Christophe Chabert

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Chabert, Christophe

Aux premières images de "No Sudden Move", Curtis, le petit truand noir incarné par Don Cheadle, tout juste sorti de prison et déjà en quête d'un coup rapide qui lui permettrait de se remettre à flot, remonte d'un pas décidé les rues de Detroit, désespérément vides de présence humaine - tournage Covid oblige, ce qui rajoute au film une dimension intemporelle, fantomatique et abstraite. Mais ce n'est pas exactement ce que Steven Soderbergh montre à l'écran : l'anamorphose de l'image en déforme les bords, si bien que cette suite de travellings donne l'impression que le personnage fait du surplace alors que le monde autour de lui paraît pris dans une révolution perpétuelle. Cet effet, qui rappelle celui d'une lanterne magique, fixe un cap : cinématographique d'abord, la mise en scène incitant sans cesse à regarder au-delà de la brillante mécanique de la narration ; mais surtout métaphysique, puisque ce film noir aux faux accents vintage - l'action se déroule en 1954 - se transforme peu à peu en fable philosophique, actualisation de "La Grenouille qui se veut faire aussi grosse que le boeuf" au temps de l'économie de marché et de sa main (pas si) invisible.

Voir le numéro de la revue «Positif, 729, Novembre 2021»

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